Les Conspirateurs – Jorge Ibargüengoitia

Description

Résumé :
Alvaro Mutis qui fut l un des premiers à inviter les lecteurs de langue française à découvrir l œuvre de Jorge Ibargüengoitia n hésite pas à voir en lui le mieux prometteur des romanciers mexicains de sa génération (celle qui arrivait à la pleine maturité au début des années 80) – et une référence pour toute la jeune littérature d Amérique latine. Sur place les lecteurs se sont longtemps divisés en deux clans : ceux pour qui chaque nouveau livre d Ibargüengoitia faisait l effet d une triple tequila du genre carabiné (mais somme toute réconfortante) et les autres à qui le même breuvage donnait des boutons. L histoire littéraire locale veut que la mort de l écrivain (dans un accident d avion en 1983) ait été vécue au Mexique comme un deuil national. N exagérons rien : beaucoup durent recevoir la nouvelle avec un soupir de soulagement car le cher disparu de roman en roman progressait doucement dans la voie de l impertinence et de la provocation tranquille – au point d en venir à irriter même ses amis de la gauche la plus tolérante. Les Conspirateurs (1982) son dernier roman publié raconte la révolution à l issue de laquelle le Mexique accéda à l indépendance au début du siècle dernier. Que les amateurs de romans historiques ne chantent pas trop vite ce livre n est pas pour eux. L auteur y traite l Histoire avec beaucoup de mauvaise éducation : en retroussant vivement ses dessous et en lui administrant une fessée grandiose. La vérité qui gagne dit-on à aller peu vêtue n est peut-être pas loin d y trouver son compte. On ajoutera ceci à l attention des âmes scrupuleuses : ignorer tout du Mexique et de son histoire ne nuit en rien au plaisir très spécial que l on prend ici.

Prenez un bel et bon événement historique de ceux que tout le monde connaît et que les enfants apprennent à révérer dès la maternelle : une fière déclaration d indépendance un assassinat politique bien sanglant une résistance héroïque devant un envahisseur naturellement supérieur en nombre. Racontez cet épisode à votre manière rendez-lui sa dimension humaine : vous pratiquez le détournement de hauts faits une oeuvre de salubrité publique qui désacralise l histoire et remet à l heure les pendules du destin C est ce que fait le Mexicain Ibargüengoitia à partir du Cri d indépendance poussé par le curé Hidalgo en 1810. Les grands prêtres du régime en place depuis quatre-vingts ans ont fait en sorte qu il soit dans toutes les mémoires avec la connivence des fresquistes du pays qui mirent sur tous les murs le crâne chauve et la bouche exaltée du bon ecclésiastique. En donnant sa version l auteur contourne l incontournable. Il peint une conspiration pitoyable au fin fond d une province brûlée quelques hommes autour de la belle Carmelita des créoles agacés de voir les métropolitains prendre toutes les places … Le récit est charmant il n est pas besoin de posséder l histoire mexicaine pour apprécier cette farce rurale à la Marcel Aymé..