Description
Résumé : On s avance dans la peinture sans savoir. La main droite poussant la main gauche. Une toile poussant l autre à tâtons. On regarde la peinture un oeil mouillé. La couleur en débord. Une toile bordant l autre. Le débord de l une tirant la suivante. La mouillure de l oeil marquant la méconnaissance. La réalité physique de la peinture marque le savoir et la méconnaissance l un rejaillit sur l autre l assure et le déstabilise. On apprend la peinture à tâtons. Claude Viallat De son travail Claude Viallat a dit un jour qu il était «nombreux et spirale». Nombreux comme la répétition d un même qui n est jamais tout à fait identique : la permanence de la forme étant aussi en même temps sa mise à l épreuve. Spirale comme un mouvement qui s enroulant sur lui-même avance peu à peu : faux recommencement où à chaque passage du nouveau surgit. Comment écrire sur cela ? Comment écrire sur un artiste dont la pratique depuis quarante ans est placée sous le signe de la fidélité à un «système» ? Question ontologique : qu est-ce que la vie d un tel homme ? Comment véritablement prendre la mesure de cette vie de peintre ? Question de méthode également : comment écrire quelle forme trouver pour saisir une oeuvre qui par son organisation même vient porter la ruine au sein de toute tentative monographique ? Telle est la double interrogation qui traverse cet ouvrage. Un essai où il est question d envisager Viallat «contre» Viallat. Non de prétendre «débarrasser» l oeuvre du commentaire que l artiste lui-même a produit mais de tenter de saisir sous le masque des mots le fondement de la méthode Viallat : un jeu du centre et des à-côtés. Le travail sur la «forme quelconque» et tout ce qui sous l apparence du détour (objets tauromachies écrits) nous y ramène et surtout l y ramène. Logique du «débord» pour reprendre un terme qui lui est cher. Ou comment faire autre chose que ce travail sur une même forme afin de pouvoir continuer celui-ci. Comment vivre en ne faisant que ça ? demandions-nous au début. Eh bien en bordant ce centre de multiples marges qui nous ramènent infiniment vers lui ! Pierre Wat professeur d histoire de l art à université d Aix-Marseille spécialiste du romantisme a publié chez Hazan une monographie sur Constable et participé au catalogue de l exposition Géricault la folie d un monde. Extrait du livre : Désapprendre Il n y a pas de ruptures dans l oeuvre de Claude Viallat. Le concept même de «rupture» est à de multiples égards inopérant appliqué à un tel travail qui fait du balancement dialectique de la tension entre chef-d oeuvre et contre-chef-d oeuvre son principe dynamique. Chez Viallat chaque geste appelle son contraire chaque forme sa contre-forme chaque peinture son objet dans une logique du brouillage des pistes. Pas de ruptures donc entre peintures et objets entre dessins tauromachiques et écrits mais une progression en spirale qui se nourrit de ses multiples débords pour mieux atteindre son but. Ainsi n y a-t-il pas d autre manière d aborder le travail de Claude Viallat que d appréhender «tout» Viallat. Tout autrement dit le jeu de ricochets entre ses multiples pratiques. Mais aussi car là non plus il n y a pas rupture les travaux d avant 1966. Ce que Bernard Ceysson nomme «Viallat avant Viallat»: les oeuvres peintes avant l adoption du «système». C est en effet seulement en se penchant sur ces années dites «de formation» que l on peut prendre la mesure de la quête profonde à l oeuvre dès les origines. Quête qui aujourd hui encore anime la pratique du peintre. Contrairement à ce que voudrait une certaine mythologie moderniste il n y a pas un avant et un après 1966. L usage d une forme quelconque ne fut pas le fruit d un décret mais le résultat d une pratique. Pratique qui sur un plan visuel ne passa pas brusquement d une figuration classique à une abstraction radicale mais s achemina par étapes de l une à l autre. Pratique enfin qui y compris dans ces premières années en apparence classiques pose les bases d un rapport profondément «incorrect» à la peinture. Ce même rapport qui aujourd hui guide sa démarche. Viallat fils cadet d un notaire installé à Aubais près de Nîmes n est pas devenu peintre par vocation et encore moins par encouragement familial. Sa passion précoce pour la poésie et les arts avait tout pour inquiéter un milieu provincial qui voyait dans la création une forme de transgression. En 1953 un échec au baccalauréat ayant conduit ses parents à le soumettre à des tests d aptitude il est décidé de l orienter vers une école d art. Ce sera Montpellier proche de Nîmes où son père l inscrit à la formation de commis d architecte. Et c est par hasard parce qu il est là ce jour-là qu il passe – sans aucune préparation – le concours d entrée en classe de peinture et le réussit. Un professeur qui a repéré son talent lui demande de faire un an de classe de dessin avant d étudier la peinture. C est là qu il se forge une maîtrise académique encore patente aujourd hui. Il suffit pour s en convaincre de voir l artiste faire à main levée des dessins tauromachiques. Dessins dont la virtuosité dit à sa façon ce contre quoi Viallat a – sciemment – élaboré son oeuvre de peintre..










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